Fabienne Verdier : « Capter le mouvement de la vie »

Répétition des musiciens du quatuor Mettis, pendant que Fabienne Verdier relit ses notes et esquisses. Aix-en-Provence, chapelle de la Visitation, 2017. (Genevaav/Wikipedia)

Fabienne Verdier est l’une des femmes peintres contemporaines les plus connues au monde. De la Chine, où elle a étudié, au Vexin, où elle a son atelier, l’artiste française nous propose un art revivifié, pont entre les hommes, les époques et les traditions.

Fabienne Verdier a passé ses premières années sur une péniche amarrée en face du musée d’art moderne de la ville de Paris où elle flânait des week-ends entiers. Le divorce de ses parents a été « très dur à vivre », explique-t-elle dans les colonnes de La Croix, et « l’art a donné un sens à mon existence« . A 15 ans, elle suit son père dans le Sud-Ouest puis prend des cours aux beaux-arts de Toulouse ; mais son regard se perd à l’Est, vers l’Asie. En 1983, elle s’envole pour la Chine.

Méditation en cobalt, 1997, technique mixte sur soie marouflée sur châssis, 180 × 260 cm. Musée Cernuschi, musée des Arts de l’Asie de la ville de Paris. (Genevaav/Wikipedia)

Pendant dix ans, elle va apprendre, auprès de Huang Yuan, la calligraphie. « Il n’y a pas de différence entre la peinture et l’écriture. Selon cette tradition, on peut dire les choses sans les informer dans un mot, en les suggérant dans un flux spontané. » Elle y apprend à peindre debout. A son retour en France, elle publie un livre, plusieurs fois primé, Passagère du silence (éditions Albin Michel). Son exposition, à la galerie Alice Pauli de Lausanne, en 2005, est remarquée par la fondation Hubert Looser de Zurich, qui lui commande une série en résonance avec les peintures abstraites et minimalistes de sa collection. En 2007, une de ses œuvres rejoint la collection du centre Pompidou. Elle prolonge sa recherche avec les primitifs flamands qui aboutit à l’exposition, en 2013, aux musées Groeninge et Memling, à Bruges. En 2019, Bruno Ely, directeur du musée Granet à Aix-en-Provence, lui propose la première rétrospective de ses œuvres.

Margareta I. La Pensée labyrinthique, d’après le Portrait de Margareta de Jan Van Eyck (1439), 2011, acrylique et technique mixte sur toile, 180 × 403 cm. Collection particulière. (Genevaav/Wikipedia)

Crucifixion et Résurrection

Dans son atelier dans le Vexin, non loin de Chambly, l’artiste travaille à sa prochaine exposition, à l’automne 2022, au musée Unterlinden de Colmar. Elle travaille plus particulièrement sur le retable d’Issenheim de Matthias Grünewald (vers 1510). Ce retable résonne avec l’actualité. Il a été commandé par l’ordre des Antonins qui se consacrait au soin des malades et à leur réconfort. « Par l’abstraction, je vais tenter d’aborder deux panneaux (la Crucifixion et la Résurrection) de ce retable qui nous enseigne quelque chose du chemin de l’homme, de son passage sur la terre, du cycle de la vie et de la mort : à vrai dire, je ne pensais pas me confronter à cela aussi vite, mais cette pandémie a accéléré ma démarche« , raconte-t-elle dans La Croix Hebdo ; « mon travail consiste à sortir de la fixité pour capter le mouvement de la vie », comme le souffle du pinceau dans la calligraphie.

Publié dans le n°29 de Missio (éditions Vexin-Thelle et Oise Normande), septembre 2020