La pandémie nous a éloignés de la culture : fermeture des théâtres, musées, cinémas… Cet été, il est temps et essentiel d’aller vers elle.
L’année 2020 fut l’année où les librairies n’étaient pas essentielles, les musées, cinémas, théâtres fermés. Certes, les mesures sanitaires étaient indispensables face au virus. Nous y souscrivons, mais la culture devait faire partie de l’arsenal. Or, un message inverse a été donné. L’année 2020 a aussi été la publication de l’étude « Cinquante ans de pratiques culturelles en France« . Heureusement, le rapport des Français à la culture reste très fort. Ce rapport est d’autant plus fort quand l’accès aux œuvres se fait jeune par l’éducation.
Nous lisons le même constat dans La culture nous sauvera, l’ouvrage de Christophe Tardieu, administrateur général du domaine de Chantilly, et de David Lisnard : « Un peuple mûr et majeur qui s’élève grâce à l’éduction artistique et culturelle devient le ciment de la nation. » Au Vatican, chaque semaine, les musées proposaient une pastille intitulée « La beauté qui réunit« . Une œuvre était offerte à la contemplation. Finalement, à y penser, la beauté nous rassemble. « Elle nous élève, nous permet de mieux comprendre les tréfonds de l’âme humaine, de communier avec les autres« , précisent les deux auteurs précédemment cités.
Faire des églises des oasis de beauté
Seules les églises étaient restées ouvertes. Si elles n’ont pas vocation à devenir des musées, comme l’a souligné Pierre Tequi dans une tribune, « beaucoup de nos églises possèdent une dimension culturelle autant que cutuelle. » Rappelons-nous tout de même des chefs-d’œuvre disparus lors d’incendies d’églises : comme la toile Saint Clair guérissant les aveugles d’Hippolyte Flandrin dans la cathédrale de Nantes ou, plus récemment, les peintures de Louis Joseph Watteau dans la collégiale d’Avesnes-sur-Helpe. Dans son encyclique Laudato si’, le pape François exhorte à protéger ces créations. « Il y a, avec le patrimoine naturel, un patrimoine historique, artistique et culturel, également menacé« , affirme-t-il. Pierre Tequi ajoute : « Nos églises ne sont pas des musées, mais bien souvent des « oasis de beauté », et il nous appartient de faire connaître la gratuité de la beauté. »
Comment assumer la beauté ?
L’académicien François Cheng a une belle formule qui interpelle : « Quand la beauté t’habite, comment l’assumes-tu? » « La voie de la beauté, à partir de l’expérience toute simple de la rencontre avec la beauté qui suscite l’émerveillement, peut ouvrir le chemin de la recherche de Dieu, fait remarquer le conseil pontifical pour la culture; […] le beau ne peut être réduit à un simple plaisir des sens : ce serait s’interdire d’avoir la pleine intelligence de son universalité, de sa valeur suprême, transcendante. Sa perception requiert une éducation, car la beauté n’est authentique que dans son lien à la vérité. »
Pour répondre au poète François Cheng, assumons notre soif de beauté. Nous avons besoin de nous émerveiller, de nous élever, de prendre un temps pour méditer devant une œuvre, de ce silence qui laisse notre cœur s’ouvrir à l’Autre. N’ayons pas peur de nous laisser bousculer. Alors que le virus est encore présent, cet été, plus que jamais, continuons de lire pour nous nourrir. Mais n’ayons pas peur aussi de rejoindre les salles de concert, les cinémas et les théâtres, d’arpenter les musées, de franchir les seuils des églises. Remplissons notre être d’émotion. Apprenons aux enfants du catéchisme et aux autres à regarder un tableau, à apprécier une statue, à s’imprégner de la lumière qui jaillit d’un vitrail. Comme se demandait Max Jacob : « Le beau ne serait-il pas la route la plus sûre pour atteindre le bien ? «
Publié dans Missio n°32, juin 2021