Jeanne d’Arc, la sainte qui nous parle

Statue de Sainte Jeanne d’Arc – église Saint Antoine de Compiègne (c) Mathieu Devred

L’Eglise célèbre, le 16 mai prochain, le centenaire de la canonisation par le pape Benoît XV de Jeanne d’Arc. Chaque année, des villes comme Orléans, Compiègne, Rouen, Reims fêtent la sainte. Ces célébrations populaires réveillent la mémoire des Français et permettent de se rappeler les valeurs qui forgent l’épopée de Jeanne d’Arc.

« Jeanne d’Arc symbolise le don total, sans calcul. Que les grands de l’époque aient fait des calculs, c’est évident ! Mais Jeanne d’Arc, non ! Il suffit de se pencher un peu sur son histoire et son sacrifice pour le comprendre et le sentir« , explique le jeune réalisateur clermontois Atam Rasho, franco-arménien, auteur d’un court-métrage d’animation de 15 minutes autour de la figure de Jeanne d’Arc et de son époque. Comment une jeune sainte de 19 ans, morte sur le bûcher à la fin du Moyen-Âge, peut-elle encore inspirer les artistes, mais aussi les hommes et les femmes de notre temps ? Si la République a consacré Jeanne d’Arc comme symbole du patriotisme en 1920 et l’Eglise comme co-patronne de la France en mars 1922, c’est que la sainte a encore quelque chose à nous dire. Qui a suivi les fêtes johanniques d’Orléans, de Compiègne ou de Rouen a pu constater la foule, si nombreuse, présente à ces journées. Sans oublier les jeunes filles qui se pressent à incarner le temps de quelques jours Jeanne d’Arc.

Jeanne d’Arc, des valeurs pour la jeunesse de notre temps

Dans son ouvrage Être Jeanne d’Arc (éditions Artège), la journaliste Marine Tertrais a recueilli le témoignage de ces jeunes filles orléanaises. Il faut avouer que les propos sont édifiants. D’ailleurs, l’auteur avoue : « A travers le témoignage (…), c’est la figure d’une grande sainte et son message pour la jeunesse de notre temps qui se dessinent.« 

Pour Mathilde Edey Gamassou, qui fut « Jeanne 2018 » : « Ce qui me touche le plus, c’est son courage, son humilité, sa loyauté envers son pays et sa persévérance dans l’adversité. » Jeanne d’Arc est une école de fidélité et d’espérance. Elle a toujours cru et, pour cela, elle a donné sa vie. Ce témoignage de vie force notre admiration. Elle incarne les vertus que saint Paul, dans sa première épître aux Corinthiens (1 Co 13,13), décrit : « Ce qui demeure aujourd’hui, c’est la foi, l’espérance et la charité ; mais la plus grande des trois, c’est la charité.« 

Une sainte universelle

Jeanne d’Arc a connu une double fidélité : la première à Dieu et la seconde à la France. Cette double fidélité en fait une figure universelle. Comme le soulignait Gabriel Hanotaux, ambassadeur de France exceptionnel auprès du Saint-Siège en 1920 pour la canonisation : « Jeanne n’est pas seulement sainte de France, elle est sainte universelle. »

« L’idée de faire un film sur Jeanne d’Arc m’est venue alors que j’étais dans la réalisation de mon dernier court-métrage d’animation Voix des soupirs qui adapte le Livre de Lamentation de saint Grégoire de Narek, raconte le réalisateur franco-arménien Atam Rasho. L’histoire des Arméniens depuis des millénaires est si tragique que seule une certaine radicalité spirituelle et chrétienne a pu redonner du sens à leur vie. En ces termes, le lien avec la vie de sainte Jeanne d’Arc est plus qu’évident.« 

Sa popularité en Asie

Plus étonnant, sous l’ère Meiji, le récit de Jeanne d’Arc pénètre le Japon. Elle fait d’abord partie de la culture savante du monde académique et universitaire. Selon l’historien Takayama Kazuhiko, une dizaine d’ouvrages (traductions ou oeuvres originales) ont permis la diffusion de l’histoire de la sainte. Peu à peu, elle marque la mémoire collective des Japonais. Le livre de Hitomi Fujimoto Bishôjosenshi Jannu Daruku délivre le message suivant : « Jeanne d’Arc est une jeune fille qui n’a jamais abandonné. » Ce livre connaît un franc succès chez les adolescents. En Corée du Sud, la jeune Yu Gwan-Sun (1902-1920) est appelée « la Jeanne d’Arc coréenne« . Elle symbolise le patriotisme, la résistance, le courage.

« Jeanne d’Arc est plus que jamais actuelle« , conclut Atam.

Publié dans le Missio n°27 – avril 2020