L’amour de Dieu nous presse

Comme dans le sport, l’enseignement ou les médias, la rentrée dans  l’Eglise est aussi le temps du « mercatho », c’est-à-dire des changements de curés, de vicaires… Cette année, douze curés seront installés dans des paroisses. L’Eglise vit et s’adapte à sa mission.

Le nombre de prêtres continue à baisser… En vingt ans, leur nombre a été divisé par deux, passant de 29 000 prêtres en France en 1995 à 15 000 en 2015. Dans l’Oise, nous n’échappons pas à cette tendance. Depuis 2010, une quarantaine de prêtres est décédée ; dans la même période sept nouveaux prêtres ont été ordonnées. Pourtant, 65% des Français se disent catholiques, alors que seulement 7% vont une fois par mois au moins à la messe.

« Il y a des défis et la communauté chrétienne doit s’adapter à cette nouvelle réalité, au risque d’épuiser ses prêtres dans une multitude de célébrations, qui sans la présence des communautés vivantes sont peu porteuses pour l’annonce de la foi« , affirme l’abbé Thomas Chapuis, curé nouvellement nommé de la paroisse de Notre-Dame de Picardie Verte au nord-ouest de l’Oise. Face au nombre décroissant de prêtres, l’Eglise doit se réinventer.

Prêtres, signes du Christ sauveur

Cette année, les nominations peuvent surprendre. Elles sont nombreuses. Les curés ne sont plus nommés pour une paroisse, mais pour un ensemble comme l’abbé Philippe Montier pour Tricot et Estrées-Saint-Denis, l’abbé Benoît Lecointe pour Guiscard, Ribécourt et Noyon, l’abbé Bernard Grenier pour Clermont et Saint-Just-en-Chaussée,  sans oublier les abbés Antoine Fernet et Mickaël Lucero pour Méru et Chambly, les abbés Stephan Janssens et Florent Mongengo pour les trois paroisses de Beauvais et enfin l’abbé Basile Mbiyavanga pour Montataire et Précy-sur-Oise. Ces curés – accompagnés de vicaires et de prêtres coopérateurs – ont des territoires plus grands. Ainsi les prêtres ne peuvent plus être des « prestataires de service » mais doivent se fixer à l’essentiel de leur ministère comme le résume Mgr Jacques Benoit-Gonnin dans sa lettre pastorale : « Ce sont des pasteurs en charge de rassembler les communautés, de les enseigner, de les sanctifier et de les conduire. » Le défi est de taille pour les communautés. Nous ne pouvons plus faire comme avant sauf à épuiser les prêtres. Il faut accepter que ma paroisse soit plus vaste que mon village et que la célébration des sacrements se fasse dans d’autres églises que la magnifique chapelle que j’ai choisie.

Relever ensemble le défi de l’avenir

Nos églises peuvent vivre autrement… Rien n’empêche une communauté de se réunir pour dire le chapelet, prendre un temps de prières, sans le prêtre, mais avec son accord. L’église est alors ouverte et devient vivante, les cloches résonnent. « Dieu n’attend pas de nous l’impossible, mais la confiance, la fidélité du quotidien et l’humble témoignage de notre attachement profond à lui« , poursuit l’abbé Chapuis. Dieu nous aime mais nous ne pouvons pas garder cet amour pour nous, il doit rayonner. C’est la mission de chaque chrétien, là où il est, et pas uniquement du prêtre. C’est à chaque communauté d’inventer et d’accueillir… Par exemple, inviter ce jeune couple du village qui s’est marié dans la paroisse ou les familles des jeunes enfants baptisés pour une soirée de prière et de fraternité.

Devenir une église accueillante et fraternelle

Dans l’évangile selon saint Matthieu (28, 18-20), Jésus dit : « Allez donc : de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, leur apprenant à garder tout ce que je vous ai prescrit. Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin des temps. » Alors qu’avons-nous fait de la promesse de notre baptême ? Savons-nous rejoindre notre voisin ou cette paroissienne qui, tous les dimanches, rentre discrètement dans l’église et se met au fond? La communauté doit donc savoir à la fois accueillir le changement de prêtre, mais aussi témoigner différemment. L’amour de Dieu nous presse aussi à modifier nos pratiques pour être attentifs à l’autre, aussi bien dans nos communautés, que pour ceux qui passent, qui demandent, car l’autre est le visage du Christ ; et de vivre la joie offerte par Dieu.

Publié dans Missio n°21 – septembre 2018